Construction irrégulière : pas de régularisation par un permis modificatif après l‘achèvement des travaux constaté dans les conditions prévues aux articles r. 462-1 et suivants du code de l’urbanisme
Dans un arrêt du 25 novembre 2020 (n° 429623), le Conseil d’État rappelle, qu’après l’achèvement des travaux constaté dans les conditions prévues à l’article R. 462-1 et suivants du Code de l’urbanisme, la régularisation d’une construction doit passer, non, par un permis modificatif, mais par un nouveau permis.
Dans l’espèce jugée, les voisins de la construction irrégulièrement édifiée et achevée avaient assigné les bénéficiaires des travaux devant le juge des référés pour faire constater la violation commise à la règle de hauteur, puis devant le TGI, afin qu’il ordonne de faire cesser cette irrégularité.
Les contrevenants ont alors demandé et obtenu un permis modificatif pour remédier à cette irrégularité. Les voisins ont saisi le juge administratif aux fins d’annulation du permis modificatif obtenu.
Le juge de première instance a rejeté leur demande et la cour administrative d’appel de Paris a rejeté leur appel contre ce jugement.
C’est dans ce contexte que le Conseil d’État, juge de cassation, a été saisi.
Aussi, après avoir rappelé :
- que l’autorité compétente, saisie d’une demande en ce sens, peut délivrer au titulaire d’un permis de construire en cours de validité, tant que la construction que ce permis autorise n’est pas achevée, un permis le modifiant, sous réserve que les modifications apportées au projet initial n’en remettent pas en cause, par leur nature et leur ampleur, la conception générale ;
- que la commune dispose d’un délai de trois ou cinq mois, selon le cas, pour s’opposer à la conformité de la construction au permis et mettre en demeure le maître de l’ouvrage de déposer un dossier modificatif ou de mettre les travaux en conformité (C. urb., art. R. 462-6) ;
- que, passé ce délai, elle est dessaisie. La construction est administrativement réputée conforme. Elle ne peut plus exiger du propriétaire, qui envisage de faire de nouveaux travaux sur la construction existante, qu’il présente une demande de permis ou dépose une déclaration portant sur les éléments de la construction existante édifiés sans respecter le permis de construire précédemment obtenu ou la déclaration préalable précédemment déposée (ég. CE, 26 novembre 2018, n° 411991 et CAA Marseille, 17 septembre 2019, n° 17MA01723) ;
Le Conseil d’État a annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris au terme du considérant suivant :
« (…) si la construction achevée n’est pas conforme au projet autorisé, le titulaire du permis de construire conserve la faculté, notamment si une action civile tendant à la démolition ou à la mise en conformité de la construction a été engagée, de solliciter la délivrance d’un nouveau permis de construire destiné à la régulariser, qui doit porter sur l’ensemble des éléments de la construction qui ont eu pour effet de modifier le bâtiment tel qu’il avait été initialement approuvé et respecter les règles d’urbanisme en vigueur à la date de son octroi ».
Il peut alors être tiré trois enseignements du contexte dans lequel intervient cet arrêt :
- après l’achèvement des travaux constaté dans les conditions prévues à l’article R. 462-1 et suivants du Code de l’urbanisme, la régularisation de la construction doit passer, non, par un permis modificatif, mais par un nouveau permis ;
- mais le seul dépôt de la DAACT ne fait pas obstacle à la délivrance d’un permis modificatif, dès lors que la conformité n’est pas encore intervenue (en ce sens, CAA Nancy, 20 janvier 2011, n° 09NC 01896);
- et, en tout état de cause, la non-contestation administrative de la conformité ne met pas à l’abri de tout et, en particulier, d’une action en réparation devant le juge civil qui peut se résoudre en nature (sur la possibilité par ailleurs pour la commune, qui ne s’est pas opposée à la conformité de la construction dans les délais requis, de saisir le juge pénal au motif de la non-conformité de la construction au permis de construire, crim., 3 décembre 2019, n° 18-86.032).
L’arrêt du 25 novembre 2020 sera mentionné aux tables du recueil Lebon.