Le pouvoir renforcé du préfet en cas de libéralités à une association
Essentiel
La jurisprudence, ainsi que l’illustre l’arrêt rendu par le Conseil d’État le 17 juin 2024, souhaite renforcer le contrôle du représentant de l’État dans la pratique du droit d’opposition du préfet à l’acceptation d’un legs par une association. Le notaire joue un rôle indispensable dans la rédaction du testament, notamment pour vérifier la capacité de l’association à recevoir le legs. Avec l’apparition de la notion d’« avantage économique suffisant», le préfet doit en outre désormais vérifier que les charges du legs n’amenuisent pas toute perspective de rentabilité pour l’association.
Le régime des libéralités faites aux associations a bien évolué ces dernières années. Il semble toutefois que la jurisprudence souhaite renforcer le contrôle du représentant de l’État dans la pratique dite du droit d’opposition du préfet à l’acceptation d’un legs par une association.
L’arrêt rendu par le Conseil d’État le 17 juin 20241 en est une illustration.
Ce principe fait suite notamment à la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021, confortant le respect des principes de la République, qui a affermi le rôle de l’État.
L’article 910 du Code civil précise les conditions dans lesquelles le représentant de l’État dans le département peut éventuellement s’opposer à la libéralité faite à une association. Initialement, l’article 910 prévoyait un accord a priori de l’autorité administrative, et Il a fallu attendre l’ordonnance n° 2005-856 du 28 juillet 2005 pour que l’acceptation par les associations soit libre sous réserve qu’aucune opposition ne soit formée par le préfet. Par la suite, le décret n° 2007-807 du 11 mai 2007 bien connu du monde associatif est venu préciser les conditions dans lesquelles le représentant de l’État peut former opposition à l’acceptation d’une libéralité au profit d’une association. Enfin, nous venons de fêter les 10 ans de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 (loi ESS), qui a élargi la capacité des associations à recevoir et conserver ce patrimoine issu de libéralités.
Selon France générosités, le montant des dons aux associations en 2019 était de près de 5 milliards d’euros2. Quant aux legs, aucun chiffre officiel n’existe mais selon les estimations les plus probables, cela dépasse le milliard d’euros annuellement. La générosité associative est donc une part importante du fonctionnement de notre société … et de notre économie!
Il convient ici de rappeler en préambule les règles applicables aux libéralités consenties aux personnes morales associatives (1), avant de préciser le rôle de l’État dans le contrôle de la réception des libéralités (Il), les motifs d’opposition (Ill) et l’apparition d’un nouveau critère renforçant le contrôle du préfet (IV). Un tableau récapitulatif sera présenté en marge de cet article.